CE - 12 juillet 2017 - N°404815


Date de la décision : 12/07/2017
Juridiction : Conseil d'Etat
Numéro RG : 404815
Catégorie : Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Conseil d'Etat - CE
Mots clés : administratif Conseil d'Etat familles référé


ProcĂ©dure : appel devant le Conseil d’État (CE) d’une ordonnance de rĂ©fĂ©rĂ© du Tribunal Administratif de Toulouse (on va directement devant le CE quand c’est une ordonnance de rĂ©fĂ©rĂ©, on ne passe pas par la Cour d’Appel Administrative)

Propriétaire : C.H.U de Toulouse

Demandeurs : C.H.U de Toulouse

DĂ©fendeurs : une dizaine d’occupantes

Date de l’ordonnance devant le TA : 17 octobre 2016

Appel par le propriétaire : 2 novembre 2016 (mémoire complémentaire le 16 novembre 2016)

Audience devant le Conseil d’État : ?

RĂ©sumĂ© de la dĂ©cision : Le propriĂ©taire se pourvoit devant le Conseil d’Etat pour faire annuler l’ordonnance de rĂ©fĂ©rĂ© qui a rejetĂ© l’expulsion en urgence d’un bĂątiment occupĂ© par plusieurs dizaines d’habitant-es (nombreuses familles). Il avait fait un rĂ©fĂ©rĂ© mesure utile (RMU) afin d’expulser les occupant-es se basant sur le fait que les troubles occasionnĂ©s par le squat nuisent au bon fonctionnement de l’hĂŽpital et justifient l’urgence. Le CE confirme l’ordonnance du juge de Toulouse : il n’y a pas d’urgence avĂ©rĂ© (pas de projet, pas de troubles particuliers ni attestĂ©) et oblige donc le propriĂ©taire a demandĂ© l’expulsion sur le fond (procĂ©dure beaucoup plus longues, l’expulsion du bĂątiment a eu lieu Ă  l’étĂ© 2023).


Sur l’urgence :
« (
) Il lui appartient, alors mĂȘme que l’occupant s’est bornĂ© en dĂ©fense Ă  faire valoir que la mesure sollicitĂ©e se heurte Ă  une contestation sĂ©rieuse sans soulever aucun moyen relatif Ă  l’absence d’urgence, de faire apparaĂźtre les raisons de droit et de fait pour lesquelles il considĂšre que l’urgence justifie ou non l’intervention, dans de brefs dĂ©lais, d’une mesure de la nature de celles qui peuvent ĂȘtre ordonnĂ©es sur le fondement de l’article L. 521-3. Ainsi, contrairement Ă  ce que soutient le centre hospitalier requĂ©rant, le respect de la condition d’urgence ne saurait ĂȘtre prĂ©sumĂ©. DĂšs lors, le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s du tribunal administratif de Toulouse n’a pas entachĂ© son ordonnance d’erreur de droit en ne regardant pas la condition d’urgence comme remplie du seul fait qu’il lui Ă©tait demandĂ© de prononcer l’expulsion d’occupants sans titre d’une dĂ©pendance du domaine public.»


« (
) Toutefois, il ressort de l’ordonnance attaquĂ©e que le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s a relevĂ© que les nuisances allĂ©guĂ©es par le centre hospitalier n’avaient Ă©tĂ© constatĂ©es ni par l’huissier mandatĂ© par celui-ci, ni par l’expert dĂ©signĂ©, et a conclu de ces constatations que leur rĂ©alitĂ© ne pouvait ĂȘtre regardĂ©e comme Ă©tablie par le seul courriel Ă©manant des membres de l’équipe de week-end de l’hĂŽpital, que celui-ci avait produit. (
) »


«(
)
 Il a, enfin, fait Ă©tat de l’absence de projet concernant le bĂątiment litigieux et de la situation des occupants, au nombre desquels figurent plusieurs familles reconnues prioritaires au titre du droit au logement opposable ainsi que des personnes malades. En statuant ainsi, le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s du tribunal administratif de Toulouse a portĂ© sur les faits de l’espĂšce une apprĂ©ciation souveraine exempte de dĂ©naturation. DĂšs lors, le pourvoi du CHU de Toulouse doit ĂȘtre rejetĂ©. »
Conseil d'Etat (CE) :
Institution publique française chargĂ©e de conseiller les gouvernements dans l'Ă©criture des lois. Elle est aussi la plus haute juridiction administrative. Le Conseil d'Etat peut ĂȘtre saisi pour se pourvoir en cassation face Ă  un jugement Ă©mis par une des 9  cours administratives d'appel.

DALO :
Droit au logement opposable. Disposition de la loi du mĂȘme nom de 2007 qui permet de donner un caractĂšre d'urgence Ă  la demande de logement social. Une commission Ă©value la situation du ou de la requĂ©rant.e, et reconnait prioritaire les personnes sur des critĂšres variĂ©s : vivant dans un logement indĂ©cent, sur le point d'ĂȘtre expulser ou n'ayant pas eu de rĂ©ponse Ă  leur demande de logement social dans un dĂ©lai "anormalement long". L'Etat a alors l'obligation de mettre tout en place pour que les personnes soient logĂ©es, et paie des astreintes s'il n'y parvient pas.

Référé :
La procĂ©dure de rĂ©fĂ©rĂ© est une procĂ©dure d'urgence visant Ă  prĂ©venir un dommage ou faire cesser un trouble illicite. On demande Ă  la juge de statuer plus rapidement que dans une procĂ©dure normale, sur le fond. MĂȘme si ça ne constitue pas un jugement dĂ©finitif, la dĂ©cision peut ĂȘtre exĂ©cutĂ©e immĂ©diatement. Il est possible de se dĂ©fendre au nom du principe du contradictoire. 
 
Le rĂ©fĂ©rĂ©, c'est une procĂ©dure ou tu saisis en urgence un juge (ca peut ĂȘtre le JCP, le juge administratif...). Par exemple, le proprio, quand il saisit le JCP pour t'expulser, c'est un rĂ©fĂ©rĂ©. Quand on saisi le juge administratif en urgence contre un 38 DALO, c'est aussi un rĂ©fĂ©rĂ©. Attention, pour saisir un juge en rĂ©fĂ©rĂ© il faut que la situation soit urgente et/ou qu'il y ait un risque manifeste d'illĂ©galitĂ©. 

Tribunal Administratif (TA) :
Concerne les bĂątiments Ă  usage public et/ou les recours contre les expulsions Ă  l'aide de l'article 38 DALO (expulsion avec arrĂȘtĂ© 24h ou 7 jours) et/ou les recours contre l'octroi du concours de la force publique.