CA - Toulouse – 14 mai 2018 - "L'Ecole"


Date de la décision : 14/05/2018
Juridiction : Cour d'Appel de Toulouse
Numéro RG : 17/05591
Catégorie : Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Délais supplémentaires - "Renouvelables"
Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Voie de fait
Mots clés : Cour d'appel délai délais de grâce enfant enfants famille familles public publique voie de fait


Procédure  : Appel d'une ordonnance du TI de Toulouse
Demandeur / Défendeur : Défendeur

Composition des habitant-es : 4 familles et 4 personnes seules

Propriétaire : Mairie de Toulouse, public

Date d’ouverture : Juillet 2017
Date d'assignation devant le tribunal d'instance : 21 août 2017
Décision du tribunal d'instance : 31 octobre 2017

Appel de la décision par le propriétaire : 22 novembre 2017

Date de l’audience : 09 Avril 2018
Date de la décision : 14 Mai 2018

Résumé de la décision :

Le juge des référés du tribunal d'Instance a renvoyé la Mairie de Toulouse en procédure de fond, estimant qu'il n'y avait pas d'urgence dans l'expulsion. Malheureusement, depuis une décision de cour de cassation en 2017 (peu après cette décision), un squat passe toujours en référé - donc en urgence.

La Mairie de Toulouse a fait appel de cette décision : donc la juge infirme l’ordonnance du premier juge (au vu de la décision de la cour de cassation).

Néammoins, la juge accorde le délai de deux mois + 6 mois de délais supplémentaires !

"Il s’en déduit qu’une expulsion immédiate aurait des conséquences humaines disproportionnées par rapport au droit de propriété protégé. Dès lors, et quel que soient les moyens qui leur ont permis d’entrer dans les lieux, il convient de ne pas supprimer le délai de 2 mois passé le commandement de quitter les lieux en application de l’article L 412- 1 du code des procédures civiles d'exécution.

Et, au regard des constatations énoncées plus haut concernant notamment l’état de santé de certains des intimés et, considérant l’intérêt supérieur des enfants mineurs vivant dans les lieux avec leur famille, ainsi que la bonne volonté manifestée par les occupants dans l’exécution de leurs obligations notamment quant à l’entretien des lieux, compte tenu également de l’absence totale de solution de relogement à court terme, et de l’absence de projet de la commune concernant ce site dont la conservation est par ailleurs préservée, la preuve est suffisamment rapportée de la réunion des conditions des articles L 412-3 et L 412-4 du code des procédures civiles d'exécution conduisant à octroyer aux intimés un délai supplémentaire de six mois pour quitter les lieux."

Et sur le controle de proportionalité que doit effectué le juge avant d'ordonner une expulsion :

"Le contrôle de proportionnalité auquel le juge des référés est tenu, ne s'opère pas au stade de la détermination de l'illicéité manifeste du trouble invoqué laquelle conditionne la compétence du juge des référés, mais au stade de la détermination et de l'opportunité de la mesure adoptée pour y mettre fin.

Ce contrôle de proportionnalité peut se manifester dans le choix des modalités qui peuvent assortir la mesure, soit pour la renforcer, soit pour en atténuer les effets.

Le juge doit donc se déterminer, au vu des circonstances de l'espèce, en confrontant les intérêts en cause et des droits fondamentaux invoqués et garantis comme en l'espèce par l'article 8 de la CEDH."
Commandement de quitter les lieux :
Suite à ton procès, le juge a établi une date à partir de laquelle tu deviens expulsable (« une date d’expulsabilité »). A la suite de cette décision, tu devrais recevoir un commandement de quitter les lieux, qui donne généralement un délai de 2 mois pendant lesquels tu ne peux pas être expulsé.e. Parfois, ce document arrive dans la semaine qui suit la décision du juge, parfois plus tardivement.

Comme l'assignation, l’huissier.e passe au squat pour remettre le document en main propre, si tu es abent.e, tu devras aller chercher ce document directement à son étude.

-A NE PAS CONFONDRE AVEC LA SOMMATION DE QUITTER LES LIEUX- : le commandement est une information sérieuse, contrairement à la sommation


Cour d'Appel (CA) :
La cour d’appel est une juridiction qui permet de demander à ce qu’une affaire soit rejugée. Tu peux faire appel si toi, ou la personne contre qui tu étais en procès, vous n’êtes pas d’accord avec la décision de la juge de première instance. La cour rend un « arrêt », qui peut confirmer ou non la première décision, ou n’en confirmer qu’une partie, c’est qu’elle appelle “réformer”  . Après un arrêt de la cour d’appel, il reste une étape si on est toujours en désaccord (et qu’on peut payer) la cour de cassation. 
La cour d’appel n’est pas compétente pour les affaires administratives, pour cela il faut passer par la cour adminsitrative d’appel. Elle statue uniquement sur les affaires pénales et civiles. 
Il y a actuellement trente-six cours d'appel en France.

Cour de Cassation (Cass.) :
La Cours de Cassation est le dernier recours de l'ordre judiciaire. Il n'existe qu'une cours de cassation, située à Paris. Elle rend des décisions qui s'appliquent ensuite sur tout le territoire, nivelant les différences d'interprétation des lois des différents tribunaux. Elle peut être saisie après un jugement en appel ou en première instance. Elle unifie et contrôle l'interprétation des lois. 
La Cour de cassation est le juge du droit. Elle ne réexamine pas les faits qui sont à l'origine du litige. Sa mission consiste à vérifier que les tribunaux et cours d'appel de l'ordre judiciaire ont correctement appliqué la loi. En d’autres termes, la Cour de cassation ne se prononce pas sur le conflit qui oppose les parties, mais sur la qualité de la décision de justice qui a été rendue. Lorsque la Cour de cassation estime que la règle de droit n’a pas été appliquée de façon adéquate, elle prononce une "cassation": la décision de justice est annulée et l’affaire est renvoyée devant une cour d'appel ou un tribunal pour être rejugée.

Délai de grâce :
Un délai de grâce est une période définie donnée par une juge afin d'accorder plus de temps à l'occupant du logement en vue de le libérer intégralement. Il est déterminé par l'article 412-3 du Code de procédure civile. 
Ce délai fait suite à la remise du commandement à quitter les lieux. Dans un délai de deux mois, on peut saisir le juge par voie de requête ou d'assignation pour demander un délai supplémentaire, de 1 mois à 1 ans. 
A noter :  la saisine du juge ne suspend pas la procédure d’expulsion.

Première instance :
Quand tu vas passer en procès, il y a plusieurs étapes.
Lorsqu'il n'y a pas eu encore de décision de justice, on parle de première instance, c'est le premier procès. C'est lui qui va produire la première décision de justice. Les audiences peuvent être renvoyées plusieurs fois (pour ça on trouve des pretextes comme ne pas avoir eu sa réponse de demande d’AJ, ou présenter de nouveaux noms sur la procédure...), c'est d'ailleurs une stratégie qui permet parfois de gagner du temps. La première instance s'arrête après le délibéré, et une fois que une décision de justice est rendue.