TA - Marseille - 25 février 2025 - N°2501564


Date de la décision : 25/02/2025
Juridiction : Tribunal Administratif de Marseille
Numéro RG : 2501564
CatĂ©gorie : ProcĂ©dure d'expulsion par arretĂ© prĂ©fectoral (art-38 loi dalo) > Le propriĂ©taire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > ArrĂȘtĂ© expulsion 7 jours
Mots clĂ©s : 38 DALO 7 jours arrĂȘtĂ© art 38 article 38 prĂ©fecture rĂ©fĂ©rĂ© suspension


ProcĂ©dure : demande de suspension de l’exĂ©cution de l’arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral mettant en demeure 2 personnes de quitter un appartement dans un dĂ©lai de 7 jours (article 38 loi DALO du 5 mars 2007) sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative

Demandeur / Défendeur : Demandeur

Date de l'arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral : 10 dĂ©cembre 2025, notifiĂ© le 12 dĂ©cembre 2025

Date de saisine du TA : 11 février 2025 (mémoire complémentaire le 24 février)

Date de l’audience : 24 fĂ©vrier 2025

Propriétaire : EPF PACA (Etablissement Public Foncier)

RĂ©sumĂ© de la dĂ©cision : L’histoire est dingue. L’appartement est occupĂ© par une dame ĂągĂ©e de 96 ans (!!!) et sa niĂšce qui doit s’occuper d’elle en permanence. Elles sont locataires d’un appartement en face de celui qu’elles squattent et elles payent le loyer tous les mois, mais elles ont dĂ» partir car l’appartement louĂ© est totalement insalubre (elles ont saisi le service de l’hygiĂšne de la ville de Marseille). Alors que le propriĂ©taire a acceptĂ© verbalement leur installation dans l’appartement squattĂ©, il a quand mĂȘme demandĂ© Ă  la prĂ©fecture de prendre un arrĂȘtĂ© d’expulsion sous 7 jours

Les conditions d’urgence Ă©tant rĂ©unis, le juge estime ensuite qu’il y un doute sur la lĂ©galitĂ© de l’arrĂȘtĂ© d’expulsion sous 7 jours de la prĂ©fecture. Et suspend donc l’expulsion !


  • Sur l’urgence : L’expulsion qui peut avoir lieu Ă  tout moment (la requĂȘte a Ă©tĂ© introduite deux mois aprĂšs avoir reçu l’arrĂȘtĂ©, donc l’expulsion pouvait ĂȘtre effective) peut entrainer des consĂ©quences irrĂ©versibles sur une dame ĂągĂ©e de 96 ans (ah bon ??).


« L’arrĂȘtĂ© en litige, qui met en demeure les requĂ©rantes de quitter les lieux sous peine d’ĂȘtre expulsĂ©es, au terme d’un dĂ©lai de sept jours Ă  compter de sa notification, par dĂ©cision qui peut intervenir Ă  tout moment et avec le concours de la force publique, est susceptible, du fait de son objet et de ses effets, et eu Ă©gard Ă  la situation trĂšs particuliĂšre de Mme de produire une situation irrĂ©versible. Par suite, la condition tenant Ă  l’urgence au sens des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative est remplie. »


  •  Sur la lĂ©galitĂ© de l’arrĂȘtĂ© : La prĂ©fecture a pris en compte la situation personnelle des occupantes APRES avoir fait l’arrĂȘtĂ©. De plus, elle dit qu’elle a « suspendue » elle-mĂȘme l’expulsion de façon officieuse dans son mĂ©moire en dĂ©fense. Alors qu’elle aurait dĂ» faire l’examen AVANT d’émettre l’arrĂȘtĂ© et qu’elle aurait pu Ă©galement annuler son arrĂȘtĂ©, la juge suspend l’expulsion de façon officielle. 


« 8. Alors qu’il rĂ©sulte de l’instruction que l’examen de la situation de a Ă©tĂ© effectuĂ©e par les services prĂ©fectoraux non pas antĂ©rieurement, mais postĂ©rieurement Ă  l’édiction de l’arrĂȘtĂ© litigieux, conduisant d’ailleurs le prĂ©fet des Bouches-du-RhĂŽne Ă  indiquer, dans son mĂ©moire en dĂ©fense, que compte tenu de la situation dĂ©licate de celle-ci, l’expulsion serait « suspendue » et une solution de relogement pĂ©renne activement recherchĂ©e, le moyen tirĂ© de la mĂ©connaissance des dispositions prĂ©citĂ©es du troisiĂšme alinĂ©a de l’article 38 de la loi du 5 mars 2007, en vertu desquelles le prĂ©fet doit ĂȘtre en mesure de justifier que sa dĂ©cision de mise en demeure a Ă©tĂ© prise « aprĂšs considĂ©ration de la situation personnelle et familiale de l'occupant », et de l’absence d’examen rĂ©el et sĂ©rieux de la situation des occupantes est, en l’état de l’instruction, propre Ă  crĂ©er un doute sĂ©rieux quant Ă  la lĂ©galitĂ© de l’arrĂȘtĂ© en litige. »
38 DALO (article) :
L’article 38 DALO permet de solliciter le PrĂ©fet afin de procĂ©der Ă  une expulsion administrative (sans juge) des lieux squattĂ©s constituant un domicile ou un local Ă  usage d’habitation.
Si elle fait l’économie de la procĂ©dure juridique classique, cette procĂ©dure
n’autorise pas pour autant la police Ă  venir dĂ©loger les occupantes sans prĂ©venir.
 
Il y a deux applications de l’article 38 DALO : 
  • Le DALO 24h
qui s’applique en cas de squat de domicile. Le propriĂ©taire est capable de prouver qu’il s’agit de sa rĂ©sidence (principale, secondaire ou occasionnelle) ou que le logement est meublĂ©. Il y a alors 24h minimum avant l’expulsion et le recours est non suspensif (ça veut dire que ça n’interrompt pas la procĂ©dure en cours, tu peux toujours te faire expulseer pendant que tu essaies de faire annuler la dĂ©cision). 
 
  • Le DALO 7 jours
Qui s’applique en cas de squat d’un local Ă  usage d’habitation (lorsque le propriĂ©taire ne peut pas prouver qu’il s’agit d’un domicile). Il y a 7 jours minimum avant expulsion et le recours est suspensif
 
Normalement, le prĂ©fet doit prendre en considĂ©ration la situation des personnes. Une mise en demeure de quitter les lieux est dĂ©livrĂ©e. 
Dans cette situation, on peut tenter un référé suspension auprÚs du Tribunal Administratif (cf le tuto "Survivre à un DALO 7 jours. Un guide en 6 étapes")

EnquĂȘte sociale :
Afin de pouvoir reloger les personnes qui sont expulsables, les autoritĂ©s sont obligĂ©es de faire une enquĂȘte sociale pour Ă©valuer les difficultĂ©s des personnes et leur proposer une solution adaptĂ©e. Toutefois, cette enquĂȘte sert souvent Ă  prendre des renseignements sur les personnes et mĂšne rarement Ă  de réélles solutions de relogement. Elle peut ĂȘtre rĂ©alisĂ©e dans un commissariat ou par tĂ©lĂ©phone. 
 
Il en existe deux types : 
  • celle qui est obligatoire en amont de l'expulsion et pour le relogement : c'est  l'enquĂȘte administrative qu'effectue la mairie et/ou la prĂ©fecture. On te demande des papiers de bases du squat : Documents d’identitĂ©s, preuves de prĂ©caritĂ©s, preuves  d'occupation.
  •  Et l’enquĂȘte dans le cadre d’une procĂ©dure judiciaire (si on te met en garde Ă  vue pour un dĂ©lit par exemple). Tu peux la refuser. Dans ce cas lĂ , tu auras une audience par des Officiers de Police Judiciaire, une assistante sociale. Ces gens vont faire une demande d'accĂšs au dossier CCAS ou mĂ©dical et contacter ton lieu  d'Ă©tude, de travail etc... Ce type d'enquĂȘte donne Ă©normement  d'information Ă  la justice et Ă  la police et peut Ă©normĂ©ment charger le  dossier judiciaire (dĂ©boucher sur des obligations de soins, contrĂŽle  judiciaire...etc).

Préfet :
Il existe plusieurs prĂ©fets, de RĂ©gion ou de DĂ©partement. Ce sont des hauts fonctionnaires, dĂ©signĂ© par dĂ©cret par le PrĂ©sident de la RĂ©publique. Ils reprĂ©sentent l’Etat Ă  l’echelle locale, chargĂ© de faire appliquer les lois. Il est le chef de la police et de la gendarmerie sur son territoire. 
Il a le pouvoir de faire des requisitions, mais prĂ©fĂšre bien souvent celui de faire des expulsions. 
 
C’est lui qui est sollicitĂ© par les propriĂ©taires lorsqu’ils souhaitent activer le 38DALO. Il a alors 48h pour rĂ©pondre. Sa dĂ©cision, favorable ou non doit ĂȘtre motivĂ©e. 
 Il tranche plus largement sur les dĂ©marches administratives (il distribu les titres de sĂ©jours et dĂ©livres des OQTF...). 

Référé suspension :
Le RĂ©fĂ©rĂ© suspension est une demande au juge des rĂ©fĂ©rĂ©s du tribunal administratif de suspendre l'exĂ©cution des effets d'un acte administratif (par exemple une decision de justice de ce mĂȘme tribunal), partiellement ou en totalitĂ©.  Ce rĂ©fĂ©rĂ© a lieu avant que ne soit statuĂ© "au fond" sur la lĂ©galitĂ© de cet acte. La personne doit justifier de l'urgence de sa demande. 

Tribunal Administratif (TA) :
Concerne les bĂątiments Ă  usage public et/ou les recours contre les expulsions Ă  l'aide de l'article 38 DALO (expulsion avec arrĂȘtĂ© 24h ou 7 jours) et/ou les recours contre l'octroi du concours de la force publique.