JCP - Toulouse - 2 octobre 2020 - RG 20/01256


Date de la décision : 02/10/2020
Juridiction : Tribunal Judiciaire de Toulouse
Numéro RG : 20/01256
Catégorie : Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne physique (particulier) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Délais supplémentaires - "Renouvelables"
Procédures d'expulsion > Squat d'activité > Le propriétaire est une personne physique (particulier) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Délais supplémentaires - "Renouvelables"
Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne physique (particulier) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Indemnités d'occupation
Procédures d'expulsion > Squat d'activité > Le propriétaire est une personne physique (particulier) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Indemnités d'occupation
Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne physique (particulier) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > S'ajouter dans une procédure - Intervention volontaire
Procédures d'expulsion > Squat d'activité > Le propriétaire est une personne physique (particulier) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > S'ajouter dans une procédure - Intervention volontaire
Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne physique (particulier) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Se retirer d'une procédure - "Départ volontaire"
Procédures d'expulsion > Squat d'activité > Le propriétaire est une personne physique (particulier) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Se retirer d'une procédure - "Départ volontaire"
Procédures d'expulsion > Squat d'activité > Le propriétaire est une personne physique (particulier) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Voie de fait
Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne physique (particulier) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Voie de fait
Mots clés : activité délai délais de grâce départ volontaire enfant enfants famille familles habitation imputabilité imputable indemnite indemnités intervention volontaire privé trêve hivernale voie de fait


Procédure : Ordonnance du JCP de Toulouse

Demandeur / Défendeur : Défendeur

Date d’ouverture du lieu : été 2018 (3 constats d’huissier : 1er aout 2018, 17 janvier 2020 et 13 mars 2020)
Date d'assignation : 17 juin 2020
1er report : 20 juillet 2020
Audience du JCP : 4 septembre 2020

Propriétaire : Privée

Composition des habitant.e.s : Personnes seules + une famille demandeuse d’asile + activités politiques


Résumé de la décision : Le juge accorde aux habitant-es le délai de deux mois après le commandement de quitter les lieux (412-1), le sursis hivernal (412-6) ainsi que 6 mois et demi (412-3 et 4) de délais complémentaires. Le commandement de quitter les lieux doit être délivré à la fin de des délais complémentaires. Donc expulsion à partir du 15 juillet 2021 !

Plusieurs choses intéressantes dans cette ordonnance.

  • Sur le départ volontaire : 3 occupant-es demandent à être mis « hors de cause ». Une attestation d’hébergement en bon et due forme suffit à se retirer de la procédure d’expulsion.
« M. x, Mme y et Mme z ont demandé leur mise hors de cause, indiquant ne plus résider dans les lieux. Ils produisent des attestations d'hébergement. Les demandeurs sont restés taisant sur ce point. Il convient donc de les mettre hors de cause. »


  • Sur l’intervention volontaire : Les proprio fort de leur 3 constats d’occupation demande le rejet de l’intervention volontaire d’une famille. Cette dernière fournit plusieurs attestations de témoignages et les constats de démentent pas les témoignages :
« Le fait que les constats d'huissier ne relèvent pas la présence de ces personnes dans le logement au moment des constatations ne suffit pas à écarter leurs droits. »


  • Sur l’indemnité d’occupation : La maison n’étant pas loué avant l’occupation, rien ne permet de déterminé sa valeur locative, même si elle existe indéniablement. De plus, les constats ne démontrent pas de dégradations. 
« Le préjudice économique que viendrait compenser une indemnité d'occupation n'est pas démontré, ce d'autant plus que l'usage « communautaire » fait du bien par ses occupants n'apparait pas de nature à le détériorer, aucun désordre particulier n'étant établi dans les constats d'huissier. »


  • Sur la voie de fait : Il n’y a pas de voie de fait car un changement de serrure pour fermer une maison n’en est pas une de + la durée de la procédure (+ de 2 ans) ne permet d’imputer la voie de fait aux personnes habitant-es au moment de l’audience.
« Le seul changement de serrures pour assurer le clos d'un logement ne constitue pas, à lui seul, une voie de fait. 
La durée de la situation, constatée pour la première fois en aout 2018 et poursuivie depuis avec des personnes changeantes, ne permet pas d'imputer spécifiquement à l'un quelconque des demandeurs une voie de fait, à la supposer établie. »

De plus, les proprios demandent à ce que les articles concernant les délais avant expulsion ne soient plus applicables car une c’est occupation « communautaire ». Le juge rejette car :
« La nature communautaire, associative ou même politique de cette occupation ne fait pas échec à la qualification de lieu habité. »


  • Sur les délais complémentaires : Les occupant-es demandent des délais complémentaires, c’est donc à eux de prouver que les conséquences d’une expulsion serait d’une exceptionnelle dureté (412-2) et que leur relogement ne pourrait se faire dans des conditions normales (412-3 et 4).
« Au cas d'espèce, l'expulsion sans délais d'une famille de demandeurs d'asiles, dont les enfants sont scolarisés et en cours d'intégration constituerait une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme, comprenant le droit au logement. »


  • Sur l’assurance habitation obligatoire : Il n’est pas possible d’obliger les occupant-es à contracter une assurance car il n’y a pas de contrat (dans le cadre d’une procédure) + les sanctions qui suivent l’absence d’une assurance ne concernent que le cadre d’un contrat locatif.
« Cette demande doit s'analyser comme une demande d'injonction de faire, au sens de l'article 1425-1 du code de procédure civile. Or cette procédure n'est pas possible en dehors du cadre contractuel. Il n'existe pas, en l'espèce, de contrat entre les parties. »
Délai de grâce :
Un délai de grâce est une période définie donnée par une juge afin d'accorder plus de temps à l'occupant du logement en vue de le libérer intégralement. Il est déterminé par l'article 412-3 du Code de procédure civile. 
Ce délai fait suite à la remise du commandement à quitter les lieux. Dans un délai de deux mois, on peut saisir le juge par voie de requête ou d'assignation pour demander un délai supplémentaire, de 1 mois à 1 ans. 
A noter :  la saisine du juge ne suspend pas la procédure d’expulsion.

Huissier/Commissaire de Justice :
Un huissier est un auxilliaire de justice, c’est à dire qu’il n’est pas magistrat mais il fait des missions pour la justice française. Il est chargé de l'exécution forcée des décisions de justice (par exemple : saisi de bien). Il est habilité à constater ce qui se passe pour pouvoir lancer des procédures ou prévenir de leur avancée. Il représente la justice et ce qu'il dit fait foi. 


Intervention volontaire :
L'intervention volontaire est le fait pour une personne qui jusqu'alors était restée étrangère à un procès en cours, mais qui estime devoir protéger ses intérêts, puisse devenir une partie dans cette procédure. Elle doit alors justifier d'un intérêt à agir. Par exemple, elle s’est installée dans le squat après que la procédure d’expulsion est été lancée et souhaite y apparaître pour se défendre.

Juge des Contentieux de la Protection (JCP) :
Le JCP est le Juge des Contentieux de la Protection. Il siège au tribunal judiciaire ou au tribunal de proximité, anciennement tribunal d'instance. Il est en charge, entres autres, des affaires d'expulsion. Il statue dans le périmètre géographique qui lui est attribué. 

Voie de fait :
En droit civil et en droit administratif, la “voie de fait” désigne un acte illégal portant atteinte aux droits de la personne ou aux libertés fondamentales. Dans notre cas, il s'agit de porter atteinte au droit de propriété qui a été revalorisé par la loi Kasbarian. 
 
Si tu es occupant.e, tu peux être accusé.e par défaut des dégradations qui ont permi de rentrer dans le batiment (c’est l’entrée par voie de fait) même si rien ne prouve que c'est toi qui les a commises : effraction, vitre cassée, changement de serrure...