JCP - Toulouse - 20 février 2025 - RG 24/03159


Date de la décision : 20/02/2025
Juridiction : Tribunal Judiciaire de Toulouse
Numéro RG : 24/03159
Catégorie : Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Délais supplémentaires - "Renouvelables"
Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Manœuvre
Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Mauvaise foi
Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Voie de fait
Mots clés : délai délais de grâce enfant enfants habitation hébergement imputabilité imputable JCP manoeuvre mauvaise foi morale public publique relogement trêve hivernale voie de fait


Procédure : Ordonnance du JCP de Toulouse

Demandeur / Défendeur : Défendeur

Date d’ouverture du lieu : fin juin 2024

Date d'assignation : 2 août 2024

Une demande de réouverture des débats a eu lieu. 

Audience du JCP : 20 décembre 2024

Propriétaire : EPFL de Toulouse

Composition des habitant.e.s : Une famille avec 6 enfants


Résumé de la décision : La juge accorde le délai légal de deux mois (L.412-1) et le proroge jusqu'au 6 juillet 2025 (L.412-2). Elle accorde également le sursis hivernal (L.412-6).

  • Sur la voie de fait et la manœuvre : classique, pas d'imputabilité de la voie de fait aux habitant.e.s et le fait de fermer/sécuriser/clore sa maison n’est pas une voie de fait ni une manœuvre. 

"Dans le cas présent, la voie de fait serait constituée par le changement de la serrure de la porte d'entrée, ce qui n'est pas démontré et la mise en place d'une chaine et d'un cadenas. Or, les photographies prises par l'huissier ne relèvent aucune dégradation. Aucune voie de fait ne peut donc être imputée aux occupant, le fait de clore l'immeuble où l'on établit son domicile, n'est pas constitutif d'une voie de fait ni d'une manœuvre. "

  • Sur la mauvaise foi : Le fait d’avoir connaissance d’occuper un bâtiment sans titre ne fait pas des habitant-es de mauvaise foi. De plus, le couple a répondu aux questions de l’huissier et l’a même laissé rentrer dans les lieux (mais c’est mieux de pas faire ça en vrai !!!).

« Sur la mauvaise foi des occupants, aucun élément autre que la connaissance de l'occupation sans droit ni titre n'est avancé et il ne saurait se déduire de cette occupation la mauvaise foi des occupants. 
En effet, Monsieur x et Madame x ont décliné leur identité à l'huissier, ne se sont pas cachés et l'ont laissé pénétrer dans les lieux, ce qui ne permet de conclure à une quelconque mauvaise foi. »

  • Sur la prorogation du délai légal de deux mois : La juge accorde des délais plus larges car le propriétaire n'a aucun projet sur le lieu et qu'il y a beaucoup de locaux vides alors que l'hébergement d'urgence est saturé. 

"La situation du logement social dans le département est connue et la présence de locaux habitables vacants, sans projet actuel ou imminent, justifie qu'un délai supplémentaire leur soit accordé jusqu'à la fin de l'année scolaire soit jusqu'au 6 juillet 2025."

Délai de grâce :
Un délai de grâce est une période définie donnée par une juge afin d'accorder plus de temps à l'occupant du logement en vue de le libérer intégralement. Il est déterminé par l'article 412-3 du Code de procédure civile. 
Ce délai fait suite à la remise du commandement à quitter les lieux. Dans un délai de deux mois, on peut saisir le juge par voie de requête ou d'assignation pour demander un délai supplémentaire, de 1 mois à 1 ans. 
A noter :  la saisine du juge ne suspend pas la procédure d’expulsion.

Entrée par voie de fait :
L'entrée par voie de fait est le fait d'entrer dans un bâtiment de façon illégale. Hormis si la porte était ouverte, quasiment toute autre façon d'entrer peut tomber sous le coup de cette appellation. Lors d'un jugement pour squat, la preuve de la voie de fait est à apporter par le propriétaire. 

Manoeuvre :
La manoeuvre recouvre tous stratagèmes ou éléments de tromperies mis en oeuvre pour favoriser l’introduction illicite (par exemple : se déguiser en employé du gaz, changer les serrures, désactiver une alarme, se faire passer pour une personne habilitée pour pénétrer dans le bâtiment ou tout autre mensonge sur tes intentions). 

Mauvaise foi :
 Le terme n'est pas clairement défini dans la loi mais le juge peut considérer que tu es de mauvaise foi si tu squattes ou si tu ne paye plus ton loyer parce que tu sais que tu es dans une situation illégale . 
Pour certains juges, cette notion s’applique donc à tous les squatteuses : elles connaissent la loi, et la violent en conséquence. Pour d’autres tribunaux, cette notion s’applique si la personne n’est pas en mesure de prouver qu’elle a essayé de se loger d’une autre façon, en faisant une demande de logement social par exemple. 

 Depuis la loi Kasbarian, cette caractérisation permet au juge de se passer du délai de deux mois après avoir reçu un commandement de quitter les lieux.

Trêve hivernale :
La trêve hivernale couvre la période du 1er novembre au 31 mars de l'année suivante. Durant cette période, les expulsions locatives ne peuvent pas avoir lieu. Cette trêve ne s'applique pas aux squatteur.euse.s pour lesquel.le.s la voie de fait a été retenue. 

Voie de fait :
En droit civil et en droit administratif, la “voie de fait” désigne un acte illégal portant atteinte aux droits de la personne ou aux libertés fondamentales. Dans notre cas, il s'agit de porter atteinte au droit de propriété qui a été revalorisé par la loi Kasbarian. 
 
Si tu es occupant.e, tu peux être accusé.e par défaut des dégradations qui ont permi de rentrer dans le batiment (c’est l’entrée par voie de fait) même si rien ne prouve que c'est toi qui les a commises : effraction, vitre cassée, changement de serrure...