Qu'est-ce que c'est ?
C'est une procédure que tu peux faire après que la décision d'expulsion ai été rendue pour ton lieu alors que ce n'étais pas toi qui été assignée devant le tribunal judiciaire : soit parce que tu ne savais pas qu'une décision d'expulsion a été rendue soit parce ce que tu es arrivée dans le squat après une décision d'expulsion.
Par exemple, tu peux tenter une tierce opposition dans ces deux situations (parmi d’autres😊) :
Malgré le fait que tu habites sur les lieux depuis un certain temps (mais après le constat d’occupation où une prise d’identité est faite), le commissaire de justice ne laisse jamais d’acte ni d’avis de passage, donc l'audience se déroule sans que tu sois au courant…
Tu es arrivée dans le squat après que la décision d'expulsion ait été rendue
La tierce opposition produit une nouvelle décision qui concerna uniquement les "tierces opposants". Donc si la juge accorde des délais avant l'expulsion dans cette décision, ils seront valables uniquement pour les personnes qui ont demandé cette tierce opposition.
Toute personne peut faire une tierce opposition à partir du moment où elle a un intérêt à agir, c'est-à-dire que cette décision la concerne.
Tu peux la faire contre toutes décisions de justice à l'exception de celles de la Cour de cassation.
C’est une procédure plutôt compliquée où il faut interagir avec la greffière, une commissaire de justice (voire plusieurs), la partie adverse… C’est quand même plus simple de passer par une avocate. Mais ce n’est pas obligatoire !
Attention ! La tierce opposition n’est pas à confondre avec une intervention volontaire qu'on peut faire pour s'ajouter à une procédure en cours, c'est-à-dire avant que la décision soit rendue (voir tuto - intervention volontaire).
Conseil : Si une audience a eu lieu mais que la juge n’a pas encore rendu sa décision, tu peux demander une réouverture des débats (voir ici), c’est un peu moins galère en vrai !
Attention ! Faire une tierce opposition n'est pas suspensif, mais tu peux demander au juge d’arrêter l’exécution de la première décision (art 590 du Code de Procédure Civile - CPC). C’est à demander dans ton assignation.
Quelles sont les conditions à respecter pour obtenir une tierce opposition ?
Il faut assigner toutes les parties du premier jugement, c'est-à-dire ton propriétaire mais aussi les autres squatteuses, en cas d'indivisibilité (art 584). C’est une notion dont on n'a pas très bien compris l'application concrète surtout en matière de squat (le seul truc qu'on a compris c'est que la nouvelle décision aurait potentiellement des effets sur tout le monde). Dans le doute, on te conseille d'assigné tout le monde (même si ça fait de la paperasse en + ...).
Si tu as plus d'info sur l'indivisibilité n'hésite pas à nous envoyer un message !
Selon l’art 583 du CPC toujours, tu dois avoir un intérêt à agir et bien entendu, tu ne dois pas faire partie de la première procédure.
On te conseille de fournir des photos, des attestations de voisins ou d’associations qui confirmeront que tu habites bien sur le lieu.
Comment on fait ?
Avant toute chose, il te faut la première ordonnance pour pouvoir l’attaquer et ainsi demander une tierce opposition.
Par exemple :
- Le commissaire de justice t’apporte une ordonnance d’expulsion immédiate et tu n’es pas sur la procédure, c’est bon, tu peux y aller, il n’y a pas de difficulté
- Tu n’as rien reçu et là ça se complique. Si tu connais le commissaire de justice ou le propriétaire, tu peux te rapprocher de lui pour avoir des nouvelles de la procédure. S’ils t’indiquent qu’un jugement a déjà eu lieu, tu peux leur demander une copie. Les commissaires de justice ne vont pas te faciliter la tâche car ils n’accepteront de remettre les documents qu’aux personnes assignées lors de la première procédure (et avec une pièce d’identité). C’est donc plus simple de passer par l’avocate adverse.
Il n'y a pas de délais (enfin si, mais il est de 30 ans) pour faire une demande de tierce opposition. Tu dois la faire à travers une assignation (voir exemple en bas). Tu dois la déposer dans le même tribunal qui a rendu la première décision.
S’il y a extrême urgence (tu es déjà expulsable par exemple) et que tu veux aller vite, tu peux demander une autorisation à assigner à heure indiquée (art 485 du CPC). Si elle t’est accordée, la juge indiquera la date avant laquelle tu dois assigner les parties (propriétaire + occupant-es sur la première procédure) ainsi que la date d’audience. Tu as un modèle en bas de page.
Si tu as un peu de temps devant toi (par exemple, si le juge a accordé aux premiers occupant-es les délais de deux mois du commandement de quitter les lieux), tu peux passer en voie de référé « classique ». Dans ce cas, tu dois aller voir le greffe du JCP, l'appeler ou encore lui envoyer un mail et il te donnera une date d'audience (le délai moyen dépend de ta ville).
Stratégie ? Il ne serait pas inimaginable d’assigné le propriétaire au fond, c’est-à-dire sans urgence particulière. Ce qui ouvre des délais beaucoup plus longs pour avoir une date d’audience. Il te faudrait alors obtenir une suspension de l’exécution auprès du juge (oui car tu seras forcément expulsable entre temps…). Ce serait assez compliqué à justifier, donc on ne te conseille pas de faire ça. Mais on est preneur de retour si cette stratégie a été utiliser.
Une fois la date d’audience obtenue, tu dois faire signifier ton assignation au propriétaire, en prenant en compte un délai dont il a besoin pour préparer sa défense (référé à heure indiqué : date indiquée par le juge dans l’ordonnance d’autorisation / référé classique : le plutôt possible pour éviter une demande de renvoi de l’audience par le proprio).
La signification se fait par un commissaire de justice. C’est payant si tu n’as pas l’Aide Juridictionnelle – AJ (environ 50€, mais cela peut être + si c’est en urgence…).
Conseil ! C’est bien de déposer une demande d’AJ (voir tuto – demander l’aide juridictionnelle) le plus vite possible pour éviter de le payer. En effet, tu peux demander dans ton formulaire d’AJ uniquement l’assistance d’un commissaire de justice et pas juste un avocat (tu peux demander les deux aussi bien sur). Et petite astuce, c’est tout à fait possible de mettre la pression gentiment au Bureau d’Aide Juridictionnelle - BAJ pour qu’il rende sa décision rapidement.
Le jour de l’audience, tu devras argumenter sur la « recevabilité » de ta tierce opposition, c’est-à-dire, prouver que tu remplis les conditions pour obtenir un nouveau jugement. Puis, comme lors d’une audience d’expulsion classique, tu parleras de ta situation personnelle et tu formuleras tes demandes de délais.
Toutefois, le second jugement pourra seulement modifier la décision sur les choses qui te sont préjudiciables (art 582 et 591). Par exemple, l'expulsion et ses délais te sont préjudiciables, mais pas les indemnités d'occupation qui concernant les personnes assignés.
Tu vas demander une "rétractation" lorsque tu fais ta demande devant le même juge (par exemple, si tu fais une tierce opposition contre une ordonnance du JCP, devant le JCP). Tu demanderas une "réformation" si c'en est un autre (dans le cas où il y a une autre procédure en cours pour la même affaire : devant le JEX par exemple ou en cour d'appel si la décision a été contestée et que tu ne peux pas faire d’intervention volontaire pour x raison).
A la fin de l’audience, le juge te donnera une date à laquelle il va rendre son jugement.
Qu'est-ce que ça fait ?
Un commissaire de justice viendra te signifier le nouveau jugement. Ton avocate t’informera aussi quand elle recevra la décision via sa case palais.
Si la juge accepte ta tierce opposition, elle va statuer sur ta demande de délai. Elle peut t’en donner ou pas, comme dans une procédure classique quoi…
Si la juge refuse ta tierce opposition, tu seras soumis aux effets du premier jugement : tu seras expulsable immédiatement ou à la fin des délais s’il y en a.
Tu peux tout à faire faire appel de la décision (mais pour rappel, ce n’est pas suspensif). Si tu fais appel, tu peux le faire en procédure accélérée (appel à jour fixe, voir ici) et demander une suspension de l’exécution provisoire (de suspendre l’expulsion) devant le Premier Président de la Cour d’Appel (voir ici).
Pourquoi faire cette procédure ?
L'avantage de cette procédure, c'est que même si l'expulsion de ton squat a été prononcée pour les autres personnes qui y vivent, le fait que tu obtiennes des délais avec la tierce opposition fait que le squat ne sera pas expulsé : les flics ne viendront pas expulser certaines personnes et pas d'autres (c’est possible en soit, mais très compliqué à mettre en œuvre).
Après c’est quand même beaucoup de travail, il faut agir rapidement et ça reste ultra rare comme procédure. Y’a une décision de tierce opposition dispo ici.
Si t’en fais une et que ça marche, ça sera l’occasion de la partager ici !
Pièces jointes :
Modèle assignation tierce opposition (il n'est pas complet, tu peux la demander via le formulaire de contact si tu veux)
Modèle de demande d’autorisation à assigner à heure indiquée (anciennement heure à heure)
Modèle d'ordonnance d'autorisation à assigner à heure indiquée (anciennement heure à heure)
Un procès est engagé contre toi, tu es « assigné à comparaître » et ça veut dire que le tribunal te demande de te rendre à une audience. Il s’agit donc d’une action, mais aussi d’un document que tu reçois en main propre de l’huissier.e. Si jamais tu es absent.e, tu reçois un courrier de l’huissier.e qui t’informe que le document est disponible à son cabinet. C’est assez important d’obtenir ce document, sans lequel tu peux ne pas savoir quel est le jour de ton procès, et donc le louper.
Tu peux en voir un exemple ici